Comment réagir face à des comportements d’autostimulation envahissants
- Julie BOUCHONVILLE
L’autostimulation : une définition
Qu’est-ce qu’un comportement d’autostimulation ou stim ? A quoi sert-il ? Doit-on le limiter ? Abordons ensemble ces questions.
Le stim, ou comportement d’autostimulation, est dans sa plus simple définition quelque chose qu’une personne fait pour le plaisir de le faire. Le stim existe chez tous les neurotypes. Danser quand la musique est entraînante, sauter sur place pour exprimer une joie immense, gratter ses cuticules quand on est nerveux ou faire tournoyer un stylo pour s’occuper les mains : tout cela, ce sont des stims. Le but de ces comportements est en général l’homéostasie émotionnelle, une manière compliquée de dire que quand on s’ennuie on va utiliser le stim pour s’occuper et quand on ressent une chose intense, on va l’utiliser pour extérioriser et s’apaiser.
Parfois, on pourra rencontrer les termes « stéréotypie » ou « pseudo stéréotypie » pour désigner ces comportements. Ils font référence à des comportements répétitifs que la personne effectue pour le plaisir de la répétition. C’est un vocabulaire plus orienté vers la psychiatrie et je pense qu’il est plus pertinent de parler d’autostimulation, qui est plus large.
Les autistes, champions de l’autostimulation ?
Le stim n’est pas typique de l’autisme en lui-même, mais certains stims sont souvent associés à ce neurotype, par exemple se balancer ou agiter les mains. Il est vrai de dire que les autistes ont tendance à s’autostimuler plus souvent, et ont sans doute moins appris à le faire discrètement que les neurotypiques. Une autostimulation « en douce » est bien un comportement appris : les enfants neurotypiques se balancent avec enthousiasme, agitent les mains, répètent des sons, bref, utilisent tout ce qu’ils ont à leur disposition pour se stimuler. C’est en grandissant qu’ils comprennent que se balancer en poussant des cris aigus, ce n’est pas le genre de choses qui se fait dans le métro.
Le stim est-il dangereux ou nocif ?
Certaines écoles d’approche de l’autisme considèrent plus ou moins ouvertement que la neuroatypie, c’est mal, et donc qu’avoir l’air autiste est inacceptable. Leur position est que le stim est un comportement parasite, qui mobilise l’attention de la personne autiste de manière improductive et la rend aisément repérable. J’aimerais disséquer cette position point par point.
- Une personne qui s’autostimule a l’air bizarre et cela peut l’isoler socialement.
Faut-il vraiment l’expliquer ? Si des personnes décident de rejeter ou harceler quelqu’un juste parce qu’il s’autostimule, ce sont elles qui ont un problème et devraient changer.
- Le stim ne sert à rien et prend de la « bande passante de cerveau » pour rien.
C’est factuellement erroné. Le stim est un comportement régulateur, comme se reposer quand on est fatigué ou boire quand on a soif. Je le répète, les neurotypiques le font aussi, ce n’est pas l’apanage de l’autisme, et personne ne vient les embêter avec cela. Si on veut reprendre l’analogie de la bande passante, il en libère donc.
- Le stim empêche de se concentrer, c’est un comportement parasite.
Là encore, c’est factuellement erroné. Tous les autistes capables de communiquer le disent : le stim aide à se concentrer en aidant le cerveau à se réguler.
Le stim est-il toujours une bonne chose ?
Certains stims devraient être découragés et remplacés par un autre comportement : ce sont ceux qui peuvent faire du mal à la personne ou qui sont ingérables. Par exemple, certaines personnes vont se frapper une partie du corps contre un support solide, se mordre ou s’arracher les cheveux. Ces stims en particuliers peuvent mener à des plaies et dans ce cas, oui, j’encourage mon lecteur à transitionner vers autre chose. Les personnes qui mordent peuvent utiliser des objets à mâcher, quelqu’un qui s’arrache les cheveux peut prendre l’habitude de caresser ses cheveux ou utiliser un jouet sensoriel qui lui donne une satisfaction comparable, etc.
D’autres comportements sont compliqués en public, par exemple crier à plein poumons ou se masturber. Les deux peuvent potentiellement avoir des répercussions légales, aussi il est important pour la personne de se stimuler autrement. Là encore, arrêter l’autorégulation n’aurait pas de sens : il faut faire une transition vers un autre comportement, aussi satisfaisant mais moins problématique.
En conclusion : faut-il laisser une personne avoir des comportements répétitifs ?
Mis à part ces deux cas, je pense qu’il est non seulement inutile mais aussi destructeur d’empêcher quelqu’un de s’auto-réguler où et quand il en ressent le besoin. Les témoignages d’adultes traumatisés par des thérapies comportementales où le stim était interdit et puni sont nombreux et effroyables. On ne le dira jamais assez, une personne ne s’autostimule pas pour être agaçante, pour désobéir ou pour attirer l’attention sur elle. Elle le fait parce qu’elle en a besoin. Parfois pendant des heures. Pour certaines personnes, c’est peut-être tout ce à quoi elles passent leurs journées. Je peux imaginer la perplexité de l’entourage face à une personne qui, même adulte, préfère danser sans aucun sens du rythme plutôt qu’avoir des contacts sociaux, améliorer ses compétences ou s’adonner à des hobbys. Le désespoir, peut-être, en constatant que ce n’est pas comme ça que leur proche passera jamais pour neurotypique.
Tant pis. Le but d’une personne autiste n’est pas de paraître normale. Le but d’une personne autiste n’est pas de mettre son entourage à l’aise ou de l’inspirer, ni d’être courageuse ou de « faire des efforts ». Le but d’une personne autiste est, comme pour le restant de l’humanité, d’être dans une situation stable qui lui permette de se sentir épanouie. Pour certains cela voudra dire un métier, une famille, des enfants, des hobbys. Pour d’autres, onze heures de stim par jour. Quel que soit le niveau d’indépendance d’une personne, quel que soit son intellect, nous lui devons le respect d’honorer ses besoins.
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