...ou « Non, Linda, ce n'est pas qu'on n'a pas envie de te voir »

Mon lecteur connaît cette situation, j'en suis convaincue : voir des gens que l'on apprécie et qui respectent peu ou prou nos spécificités est plaisant. Mais, pour un introverti [1] , c'est aussi fatigant. Les extravertis ne le comprennent pas toujours. Comment leur faire voir la vérité ? Idéalement, avec cet article [2] .

Autiste et introverti : n'est-ce pas la base ?

Pas nécessairement. Et il nous faut commencer par déterminer ce que veut dire, au juste, « introverti ». Si dans la conversation courante on l'utilise pour qualifier une personne tournée vers son monde intérieur, peu exubérante, voire taiseuse ; Lorsqu'on utilise le terme pour parler d'un trait de personnalité, on va plutôt considérer que le mot qualifie comment les contacts sociaux influencent l'énergie d'une personne.

Dans le langage courant, l'on a tendance à mélanger autisme, réplique sur soi, timidité, anxiété sociale, mauvaise compréhension des rapports sociaux, etc. Si toutes ces notions sont proches, elles ne sont pas synonymes pour autant, et penser que tous les autistes se verraient bien ermites au fond d'une grotte est un raccourci un peu grossier.

Fatigue et contacts sociaux

Certaines personnes se rechargent au contact des gens qu'ils aiment : papoter avec un ami les délasse comme un bain chaud, un débat leur donne du tonus, et s'ils peuvent se fatiguer en parlant d'un sujet complexe ou sérieux, une conversation légère leur permettra de changer de régime et les rafraîchira. Ces gens sont extravertis.

Une personne introvertie, en revanche, bien qu'elle puisse aimer les contacts sociaux — rares sont les humains qui n'aiment pas passer du temps avec leurs amis, quel que soit leur neurotype — devra fournir un effort pour les accomplir, ce qui va entraîner une fatigue . Pour elle, les contacts sociaux ne sont pas une activité reposante, et elle doit donc les limiter, au moins de temps à autre, pour recharger ses batteries.

Le plaisir retiré de la sociabilité est ici secondaire, tout comme l'est le type d'activités privilégiées.

Autisme et énergie sociale

Parfois, une personne autiste peut être enthousiaste et pleine de vie dans un contexte de rencontre sociale, et parfois, elle semble traîner les pieds à l'idée de venir. Il peut même arriver que la même personne, pourtant d'excellente compagnie quelques minutes ou heures plus tôt, semble s'éteindre d'un coup et ne réagir plus normalement, voire devienne impolie et sèche ou quitte l'évènement de manière précoce.

C'est très perturbant pour les extravertis, qui peuvent penser que la personne est folle ou pénible. Dans les faits, elle est sans doute introvertie : selon là où en sont ses réserves d'énergie, elle ne va pas réagir de la même manière au même contexte. Parfois, si elle a mal planifié son emploi du temps ou pas pris en compte un paramètre, il se peut même que la réserve s'épuise en pleine avec des amis ou de la famille. Dans ces cas-là, hélas, il n'y a plus rien à faire que se reposer.

Du refus des invitations

Peut-être mon lecteur, toujours dans l'hypothèse que ceci lui a été envoyé par un proche bienveillant désirant qu'il comprenne , s'est déjà retrouvé perplexe face à un refus d'organiser une rencontre.

Imaginons : il propose à Myrtille de se voir, pourquoi pas avec Ananas et Kiwi, et Myrtille, dont il ne doute pourtant pas de l'affection, lui dit qu'elle est fatiguée en ce moment et n'a pas envie de voir quiconque. Alors qu'ils sont des amis proches ! Mon lecteur peut se poser la question : est-il fatigant ? Myrtille est-elle en train de lui dire qu'il l'épuisement ? Ou est-elle malade, et « fatiguée » ne serait-elle ici qu'un euphémisme ?

Cela semble terrible, ça ne l'est pourtant pas : les personnes introverties peuvent, parfois, avoir besoin de refuser de voir des gens, même si cela les attriste un peu, parce qu'elles n'ont tout simplement pas l'énergie de le faire. Ce n'est pas contre vous, cher lecteur.

L'autiste extraverti

…existe. Ce n'est pas un animal mythique comme le yéti. Nous pouvons être fatigués par les stimulations sensorielles liées à un évènement social, sans pour autant l'être par ses participants et leur contact.

Parfois il peut même être difficile pour une personne autiste extravertie de comprendre que parmi ses proches se trouve un introverti qui, malgré toute la bonne volonté du monde, n'a pas les mêmes besoins en termes de contacts sociaux [3] .

Dans tous les cas, il est important de distinguer la personne autiste, la personne casanière et la personne que les contacts sociaux fatiguent. Ces caractéristiques peuvent cohabiter, mais rien ne les y oblige.

Mon proche introverti peut-il s'entraîner pour être moins fatigué par les contacts sociaux ?

A première vue [4] , non. Ceci étant dit, on peut entraîner d'autres paramètres qui ont tendance à y être mélangés : l'anxiété sociale, la timidité et la tolérance aux stimulus visuels et sonores [5] , par exemple. En travaillant sur ces facteurs, on peut rendre un évènement social moins pénible.

Dans l'absolu, il convient aussi de s'interroger sur la nature de la démarche : faut-il changer une personne introvertie ? Est-ce une mauvaise chose d'être introverti ? Si la personne en souffre, il est entendu qu'elle cherche des solutions, et se rapprocher d'un thérapeute serait une bonne idée. Si en revanche elle est satisfaite ainsi, il n'y a aucune raison de chercher à changer quoi que ce soit.